ՊԱՏԱՐԱԳԸ ԻՄ ԵԿԵՂԵՑՒՈՅ ՄԷՋ

 

La Messe dans mon Église

Extrait de la messe dans mon église -La Divine liturgie de l’Eglise Apostolique Arménienne

« Je vis dans les épines et je ne donne pas de fruit. Mais je sens que le Christ fait tout pour  me sauver. Mon  espoir est que son amour  pour moi sera plus fort que ma scélératesse »

Quand j’ai lu ce merveilleux préambule, qui se trouve dans la présentation de la Divine Liturgie Apostolique Arménienne, ce fut non seulement une émotion mais une impression profonde et décisive. C’était comme si j’avais vécu en aveugle et que, d’un seul coup, je recouvrais la vue. Je me suis reconnue. J’ai regardé ma scélératesse cela m’a fait mal.

Je suis arménienne et mes parents ont vécu le génocide, (mon père est décédé il y a 30 ans il avait 67 ans) les massacres, jusqu’en 1923. Toute ma famille venait d ‘Afhion Karahissar. Ceux, peu nombreux, qui ont survécu sont arrivés en 1926 à Marseille, après avoir transité un temps en Grèce. Ma mère avait alors 13 ans. Mon père 17 ans.ma famille s’est arrêtée là, juste le temps d’être envoyée avec des contrats de travail dans les départements où l’on demandait de la main d’œuvre laborieuse Je suis arménienne et je ne parle pas l’arménien, ni ne le comprends. En vieillissant je le ressens comme une dépossession. C’est un trouble qui me rend mal à l’aise. Lorsque je me trouve au milieu d’arméniens qui croient que je comprends et parle l’arménien ; que je suis sensée connaître je suis saisie d’une paralysie totale, et plus aucun son ne sort de ma bouche. Ma mère ne nous a pas transmis la langue arménienne Mon père parlait arménien mais il parlait beaucoup turc, ne se plaignait presque jamais. Mon père était une force de la nature d’une grande douceur et d’une bienveillance innombrable .Nous avons vécu en Ardèche et une fois que nous nous sommes installés en banlieue parisienne, faute d’église apostolique arménienne à proximité je suis allée à la paroisse Saint Anne de Polangis à Joinville le Pont. J’ai appris le catéchisme avec des prêtres bons, généreux et loyaux avec les enfants modestes que nous étions. J’ai fait ma première communion, celle qui permettait aux petits de communier pendant la messe, puis la communion solennelle à 12 ans, et enfin la confirmation. J’aimais le catéchisme.
A la maison, les drames étaient fréquents, mes parents ne s’entendaient pas. Nous vivions comme des arméniens,et mangions arménien. Ma mère parlait arménien avec sa mère, sa tante et ses frères. Elle lisait et écrivait en arménien, parlait avec beaucoup de véhémence, d’exaltation de son pays perdu,  de sa chère école à Afhion Karahisssar, des massacres, des marches interminables sans eau ni nourriture, de ceux issus de notre famille qui se sont perdus dans cet effroi. J’avais 10 ans. J’écoutais terrifiée le récit des atrocités, des abominations. Je la voyais lire ce livre*(toujours en ma possession que j’ai ré-ouvert que récemment) qui me faisait si peur avec sa page de couverture beige, représentant la carte de la Turquie avec les points de déportations en formes de gouttes de sang. .. Si je n’avais pas eu cet espace de vie léger que je trouvais à la paroisse, je ne sais ce qui  serait advenu .
Dans les périodes où elle n’était pas dépressive, elle m’emmenait parfois, à des représentations admirables de danses arméniennes, à la grâce infinie que j’adorais, et qui me faisaient rêver, mais aussi à des concerts arméniens. C’est en allant avec elle que j’ai connu la musique traditionnelle arménienne et les compositeurs arméniens Ara Bartévian Tchilinguirian, katchaturian et notre divin Komitas Vartabed… Pendant ces moments je crois qu’elle était heureuse. A Pâques elle m’emmenait à l’église arménienne, rue Jean Goujon à Paris. C’était mon seul contact avec la confession arménienne. Ma confession… Puis, le temps de la dispersion arriva. J’ai tout à apprendre.

Extrait de la messe dans mon église -La Divine liturgie de l’Eglise Apostolique Arménienne
« J’arrive avant la messe vers neuf heures, les prières certaines pareilles chaque dimanche, d’autre différentes selon le calendrier liturgique, sont très belles »
J’aime arriver tôt moi aussi pour l’office du matin. J’ai besoin de me recueillir. Je ne veux pas être loin de l’autel. J’ai besoin d’ entendre Hayr Mer et de le réciter à haute voix. Bientôt va résonner le cantique allègre Hichestsouk, un peu plus tard viendra. Park I Partzouns, Saghmos et d’autres superbes charagans aux mélodies poignantes.** Ensuite seulement, pas avant, je suis prête pour vivre le thap’or, moment très émouvant pour moi.Sourp Badarak peut alors commencer. Plus tard peut-être suivront les requiem.

Extrait de la messe dans mon église -La Divine liturgie de l’Eglise Apostolique Arménienne

«  Maintenant, quand ma bougie s’allume et que les chants apaisent ma peur de la mort, je regrette que le moment où je dois quitter l’église soit déjà arrivé. »

Oui. Il me semble que je viens juste d’arriver, et c’est déjà le moment de partir… J’ai des ailes sous les pieds. Pourtant; je sens que je ne veux pas m’en aller. Je suis triste de quitter ta maison, que  l’on a faite si chaude et splendide Je m’en vais, remplie de toi, de tous ces cantiques écrits et chantés pour toi. J’ai quitté l’église. Sur le chemin du retour Je pense à dimanche prochain, où, de ma pauvre voix je pourrais chanter à nouveau dans cette Sainte Église pour te célébrer, toi qui m’apaise, me console, emporte mes angoisses et me contente quand je demande au Père Éternel en ton nom Jésus-Christ et selon sa volonté. la force, le courage dans les épreuves moi qui ne suis digne ni de te demander ni de te recevoir.

Je ne trouve pas de mots à accrocher à ma peine et mes prières sont remplies de soupirs.

Il va falloir tenir encore toute une semaine dans les tribulations, les infortunes, les épreuves, les ressentiments, les hostilités, vivre avec tous mes manquements, mes fautes, mes carences, mes désespoirs, mes lâchetés. Megha Megha Azdoudzo.

                                                                       Alice

Extrait du cantique de Nercès Shnorali

Hichestsouk

Ahiv yév toghoutiamp gatstouk i haghotes
Yéguial khodovanéstsouk ezhantans :
Yev kdsoutk i Krisdossé ezkavoutioun yév ezmédz  zoghormoutioun :
Havidians havidenits amén Alléluia, Alléluia, Alléluia. :
Amén . Alléluia, Alléluia, Alléluia

* Le deuil national arménien*
Par R Donikian J Nazarian V Solakian
Brochure publiée par le Centre d’études arméniennes-1964-

**Dont j’ai la traduction en français de l’Église d’Arménie

J’aime la tendresse implorante de nos poignants charagans,
Et l’odeur suave de notre encens.
J’aime partir tôt le dimanche, prendre le temps
Qu’il faut, pour marcher lentement jusqu’à ta maison.
J’aime l’été parce que, du dehors,
Par la porte restée ouverte, je peux voir ton autel allumé
J’aime l’hiver et marcher dans le froid,
Pour avoir plus de joie et d’ardeur à te retrouver.
Il n’est nul autre endroit où je veuille autant demeurer
Que dans ta maison.
J’aime les voix vibrantes des chants intenses
Des pères, des diacres
Des chantres de ton église.
J’ai marché longtemps comme une aveugle, avant  de te trouver,
Tant de chapelles partout ailleurs, où je n’ai fait que passer.
J’ai voulu un jour, pour toujours enfin m’arrêter
Dans ta maison.
J’aime la simplicité chaude de la splendeur de nos églises,
La ferveur et la fidélité de leur population.

Alice

Je voudrais arracher la douleur
Infâme, monstrueuse,
Qui lentement t’a vu  mourir,
Effacer de ta mémoire, la détresse,
Et toutes tes blessures.
Recueillir  tout le long du jour,
Les morceaux de ton cœur
Mille fois éclaté.
Tant de joie, de tendresse, à chanter
Des psaumes, hymnes et antiennes
Hayr Sourp,
Les plus beaux cantiques, aujourd’hui
S’évanouissent
Dans nos gorges serrées.
C’est le souffle inachevé, retenu
C’est le temps suspendu
Et, comme un ruisseau de prières,
Coulent pour toujours,
Les perles de nos larmes amères.

24 avril 2008

Alice Teriltzian

 


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